cgt ftv  Déclaration liminaire de la CGT
 au CSE central de juin 2024
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Après la sidération de la dissolution de l’Assemblée Nationale, la possible arrivée au pouvoir de l’extrême droite ne laisse personne indifférent.

En 1ère ligne, à la fois comme symbole des services publics et d’une information indépendante, l’Audiovisuel Public est une des cibles principales du Rassemblement national qui sous prétexte d’économies affirme vouloir privatiser nos entreprises. Un processus contraire aux règles européennes et même anticonstitutionnel selon la position du Conseil Constitutionnel.

En réalité, ne jouons pas avec les mots, en cas de victoire du parti de Mme Le Pen aux élections, il s’agit de la disparition programmée de l’Audiovisuel Public qui sera vendu à la découpe, démantelé, voire même supprimé.

Juridiquement et économiquement, une privatisation complète ne serait sans doute pas possible. Mais le risque est grand de lui couper les ailes budgétaires dès  2025 et de le réduire à peau de chagrin. Ou bien de le transformer totalement en chaîne d’État sur le modèle de ce qu’a fait Orban en Hongrie.

Face à un tel danger existentiel et démocratique, la neutralité de confort n’est pas et ne sera jamais une option pour la CGT. Notre organisation syndicale est indépendante des partis politiques mais elle n’est pas neutre, en particulier quand il s’agit de défendre les fondements de notre République.

Nous nous insurgeons de l’éviction, au nom d’une soi-disant neutralité, de 5 journalistes membres du bureau de la SDJ France 3 Rédaction nationale, qui a appelé à faire front contre l’extrême droite.. Un deux poids deux mesures particulièrement révoltant, alors que dans le même temps, plusieurs journalistes qui passent leur temps à afficher leur macronisme et leur hostilité au Nouveau Front populaire, bénéficient eux d’une grande complaisance de la part de la direction.

Est-il plus grave d’appeler à un front républicain contre l’extrême droite que de dénigrer à l’antenne la gauche française ?

Est-ce cela que doit produire la prétendue clause de neutralité que la direction veut intégrer dans le règlement intérieur de l’entreprise ? Une arme de l’arbitraire qui permettra à nos dirigeants ou à ceux qui seraient nommés par le Rassemblement national de purger tout point de vue contestataire ?

Nous demandons solennellement à la direction de ne pas se rendre complice de cette dérive. Nous demandons le retrait de cette clause de neutralité du projet de modification du règlement intérieur de l’entreprise. Nous demandons que l’on sorte du régime de l’émotion et des affichages politiques pour remettre de l’équilibre et de la justice au sein de cette période troublée.

Cette dissolution inopinée – pour ne pas dire irresponsable – de l’Assemblée Nationale est un événement politique majeur de la Vème République. Et la chaine d’info en continu du service public, Franceinfo, serait purement et simplement écartée de la couverture des soirées électorales ?

Est-ce ainsi que la direction entend la renforcer face à ses concurrentes et lui donner de la notoriété ?

Les salariés, qui n’ont pas compté leur investissement depuis le lancement en 2016, sont outrés de cette décision d’effacement et la refusent. Pourquoi une telle décision ? Là encore, c’est l’incompréhension, dans le moment grave et historique que nous vivons. La direction de France Télévisions est-elle déjà prête à sacrifier le Canal 27 face à CNews ?

On pourrait penser, comme on l’a senti au moment des débats sur les orientations stratégiques, que nos dirigeants sont un peu tétanisés, suspendus à des incertitudes politiques autour de notre avenir et de notre financement. Pourtant, quand il s’agit de contractualiser avec les producteurs privés, l’entreprise n’a étrangement plus de difficulté à se projeter. Sans même savoir si et comment elle sera financée, elle vient de signer pour 5 ans un engagement d’investissement de 2,6 Md€ sur la création audiovisuelle et le cinéma. La vie est belle pour les producteurs privés. Manifestement moins pour les salariés de notre maison sur lesquels on se proposait, jusqu’à peu, d’économiser 200 millions.

Une fois encore, on est dans un deux poids deux mesures qui détruit la confiance en interne et nourrit le ressentiment. Un peu comme les Français à l’égard de Macron.

Au lieu d’arborer une neutralité factice qui n’est qu’une perpétuation du système dominant, la direction devrait se montrer à la hauteur du moment et de la menace existentielle qui pèse sur notre entreprise et ses salariés.

N’ayez pas peur, usez de votre liberté d’expression pendant que vous en avez encore ! Comme vous l’avez déjà fait en avril 2024, Mme la Présidente, quand il s’agissait d’autres pays européens : « De la Hongrie à l'Italie, des mouvements illibéraux remettent en cause notre existence. En campagne, leurs discours promettent de nous éradiquer, mais une fois arrivés au pouvoir, leur première décision est bien souvent de façonner des médias publics à leur main. » (extrait de La Tribune, 23 juin 2024)

Dans l’Histoire, la CGT a toujours pris ses responsabilités, en se plaçant du côté des plus vulnérables et en résistant face au pire. Cela n’est pas qu’un slogan, ce seront, le cas échéant, des actes de résistance contre la dérive fasciste et nous invitons les salariés à nous rejoindre, dès maintenant, pour faire front, ensemble, et défendre nos valeurs démocratiques

Paris, le 27 juin 2024

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